Réponse de la CJUE à la CAA de Lyon à la question préjudicielle portant sur l'existence dans le code des pensions civiles et militaires de retraite de discriminations indirectes entre hommes et femmes
Régime de retraite des fonctionnaires et principe d’égalité de rémunérations entre travailleurs masculins et féminins
La Cour administrative d’appel de Lyon a jugé utile d’interroger la Cour de Justice de l'Union Européenne de questions préjudicielles sur l’existence dans le code des pensions civiles et militaires de retraite (réforme de 2003) de discriminations indirectes entre hommes et femmes, avant de se prononcer sur le litige au fond dont elle a été saisie par un agent de la fonction publique hospitalière.
Un fonctionnaire, père de trois enfants, fait appel du jugement en date du 17 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa requête tendant à la condamnation de l’Etat à réparer le préjudice qu’il estime avoir subi en conséquence du refus de la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) de lui accorder le bénéfice d’une retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate et une bonification d’ancienneté aux fins du calcul de sa pension, en qualité de père de trois enfants.
Les questions préjudicielles adressées à la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) par la Cour administrative d’appel de Lyon dans son arrêt N° 12LY02596 en date du 3 avril 2013, porte sur la conformité avec l’article 141 du Traité instituant la Communauté européenne [Egalité des rémunérations entre travailleurs féminins et masculins], de la législation française issue de la nouvelle rédaction des articles L. 24 et R. 37 du code des pensions civiles et militaires ainsi que de la bonification résultant des dispositions du 2° de l’article 15 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003
La CJUE s’est prononcée par un arrêt C-173/13 en date du 15 juillet 2014 par lequel elle admet la recevabilité des questions posées par la CAA de Lyon et juge que :
« 1) L’article 141 CE doit être interprété en ce sens que, sauf à pouvoir être justifié par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe, tels qu’un objectif légitime de politique sociale, et à être propre à garantir l’objectif invoqué et nécessaire à cet effet, ce qui exige qu’il réponde véritablement au souci d’atteindre ce dernier et qu’il soit mis en œuvre de manière cohérente et systématique dans cette perspective, un régime de bonification de pension tel que celui en cause au principal engendre une discrimination indirecte en matière de rémunération entre travailleurs féminins et travailleurs masculins contraire à cet article.
2) L’article 141 CE doit être interprété en ce sens que, sauf à pouvoir être justifié par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe, tels qu’un objectif légitime de politique sociale, et à être propre à garantir l’objectif invoqué et nécessaire à cet effet, ce qui exige qu’il réponde véritablement au souci d’atteindre ce dernier et qu’il soit mis en œuvre de manière cohérente et systématique dans cette perspective, un régime de mise à la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate, tel que celui en cause au principal, engendre une discrimination indirecte en matière de rémunération entre travailleurs féminins et travailleurs masculins contraire à cet article.
3) L’article 141, paragraphe 4, CE doit être interprété en ce sens que ne relèvent pas des mesures visées à cette disposition des mesures nationales, telles que celles en cause au principal, qui se bornent à permettre aux travailleurs concernés de bénéficier d’une retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate et à leur accorder une bonification d’ancienneté lors de leur départ à la retraite, sans porter remède aux problèmes qu’ils peuvent rencontrer durant leur carrière professionnelle. »
Il reste à la Cour administrative d’appel de Lyon de trancher le litige au fond soulevé par ce fonctionnaire